C’est son premier jour sous contrat ! K. est tout fier de
l’annoncer, perché à 6 m de haut sur un échafaudage. Pas de casque… pas
de harnais… pas de fiche de renseignement accrochée à l’échafaudage…
Bienvenue K. !
Arnaud, responsable de plusieurs chantiers, vient vérifier que tout est OK :
— « Les consignes de sécurité ne sont pas vraiment respectées, dites ? »
— « Oui, en effet, ce n’est pas normal. Mais je ne suis pas l’employeur, ce n’est pas moi qui définit les modes opératoires. Je viens juste contrôler que le chantier évolue. Je ne peux que rappeler les consignes, mais je n’ai pas plus de prérogatives. »
C’est que, comme la plupart des chantiers de travaux publics, les salariés sont issus d’entreprises sous-traitantes, de petites tailles. Quelques impératifs, normalement imposées par le donneur d’ordre, passeraient alors à la trappe…
Ce 29 janvier, électriciens, peintres, plâtriers, carreleurs… Une dizaine de travailleurs se croisent sur ce chantier de la ville de Paris. Ils seront collègues pour quelques mois, avant de trouver un futur chantier, de futurs collègues, pour quelques mois encore.
L’utilisation de la sous-traitante dans le bâtiment une « pratique ultra courante », affirme Mehdi, délégué syndical. « Il ne faut pas s’étonner, de fait, qu’il y ait plus de risque de travail non déclaré, de main d’œuvre non qualifiée et d’accidents ! Mais c’est tellement difficile de trouver du travail qu’on accepte celui qui vient, peu importe les conditions. »
Et pour ceux qui travaillent dans les petites entreprises, « c’est double peine », poursuit Mehdi.
D’abord, le matériel, « c’est du niveau des magasins low cost à côté du matos d’enfer dans les grosses boîte. Et on est des fois contraints de ramener son propre équipement », toutes les entreprises ne les fournissent pas. « Parfois il faut débourser de notre poche plusieurs centaines d’euros. En cas d’intempéries, par exemple, dans les grosses boîtes, on fait une pause. Dans les plus petites, on continue de travailler… » Des visites à la médecine du travail ? « Ben non », sourit Alain, électricien. « On ne voit jamais de médecin du travail, on change de patron tous les trois mois ! » Malaise… quand on a en mémoire certains chiffres : un mort par jour dans la construction. Un accident grave toutes les 5 minutes dans les chantiers. 7 ans de vie en moyenne de moins entre un ouvrier et un cadre, à cause des conditions de travail.
Mais voilà que le gouvernement, en 2017, a enlevé de la liste des items éligibles au compte pénibilité le port de charges lourdes, les postures de travail pénibles, les vibrations mécaniques et l’exposition aux risques chimiques. Et le projet de loi du gouvernement concernant la réforme des retraites viserait à supprimer tout départ avant 60, voire 62 ans pour les salariés soumis aux travaux pénibles.
George en rit ! Pour lui, ce projet est une blague : « Travailler au-delà de 60 ans… haha… mais je ne peux même pas l’imaginer ! » Ses voisins de chantiers partagent unanimement l’avis. L’un d’entre eux raconte qu’un de ses amis s’est tellement « bousillé le dos au boulot qu’il ne peut plus mettre ses chaussures seul avant d’aller au travail, c’est sa femme qui l’aide tous les matins… » Après 50 ans, affirme un autre, « on est tous abîmés ».
La fédération CGT de la Construction, du Bois et de l’Ameublement, rappelle Christian, délégué CGT d’une filiale du groupe Vinci, revendique la reconnaissance de la pénibilité, la retraite à 55 ans pour les travailleurs confrontés aux travaux pénibles et donc pour un 43e régime spécial de retraite pour tous les salariés du bâtiment. Le système par points serait une attaque inacceptable selon lui, d’autant plus qu’après 50 ans dans le bâtiment, il n’y a pas de reconversion professionnelle possible, d’aménagements de fin de carrière. Ça n’existe pas. Alors la suite, pour ces salariés : « Chômage puis RSA », conclut Christian. « Moi, je viens d’une entreprise importante, on a des représentants du personnel, on peut revendiquer sans se faire virer. On a une porte de secours. Dans les TPE, il y a beaucoup de précarité, se mettre en grève c’est mission impossible, tout comme faire reconnaître ses conditions de travail ».
Mission impossible…. Peut-être pas. Fin novembre 2020, les quelque 5 millions de personnes qui travaillent dans les entreprises de moins de 11 salariés pourront élire des représentants. Pour la troisième fois, ces salariés plutôt isolés ou souvent loin d’un représentant qui peut les informer, les aider, les accompagner, auront à se prononcer pour mieux faire avancer leurs droits et leurs conditions de travail.
— « Les consignes de sécurité ne sont pas vraiment respectées, dites ? »
— « Oui, en effet, ce n’est pas normal. Mais je ne suis pas l’employeur, ce n’est pas moi qui définit les modes opératoires. Je viens juste contrôler que le chantier évolue. Je ne peux que rappeler les consignes, mais je n’ai pas plus de prérogatives. »
C’est que, comme la plupart des chantiers de travaux publics, les salariés sont issus d’entreprises sous-traitantes, de petites tailles. Quelques impératifs, normalement imposées par le donneur d’ordre, passeraient alors à la trappe…
Ce 29 janvier, électriciens, peintres, plâtriers, carreleurs… Une dizaine de travailleurs se croisent sur ce chantier de la ville de Paris. Ils seront collègues pour quelques mois, avant de trouver un futur chantier, de futurs collègues, pour quelques mois encore.
L’utilisation de la sous-traitante dans le bâtiment une « pratique ultra courante », affirme Mehdi, délégué syndical. « Il ne faut pas s’étonner, de fait, qu’il y ait plus de risque de travail non déclaré, de main d’œuvre non qualifiée et d’accidents ! Mais c’est tellement difficile de trouver du travail qu’on accepte celui qui vient, peu importe les conditions. »
Et pour ceux qui travaillent dans les petites entreprises, « c’est double peine », poursuit Mehdi.
D’abord, le matériel, « c’est du niveau des magasins low cost à côté du matos d’enfer dans les grosses boîte. Et on est des fois contraints de ramener son propre équipement », toutes les entreprises ne les fournissent pas. « Parfois il faut débourser de notre poche plusieurs centaines d’euros. En cas d’intempéries, par exemple, dans les grosses boîtes, on fait une pause. Dans les plus petites, on continue de travailler… » Des visites à la médecine du travail ? « Ben non », sourit Alain, électricien. « On ne voit jamais de médecin du travail, on change de patron tous les trois mois ! » Malaise… quand on a en mémoire certains chiffres : un mort par jour dans la construction. Un accident grave toutes les 5 minutes dans les chantiers. 7 ans de vie en moyenne de moins entre un ouvrier et un cadre, à cause des conditions de travail.
Mais voilà que le gouvernement, en 2017, a enlevé de la liste des items éligibles au compte pénibilité le port de charges lourdes, les postures de travail pénibles, les vibrations mécaniques et l’exposition aux risques chimiques. Et le projet de loi du gouvernement concernant la réforme des retraites viserait à supprimer tout départ avant 60, voire 62 ans pour les salariés soumis aux travaux pénibles.
George en rit ! Pour lui, ce projet est une blague : « Travailler au-delà de 60 ans… haha… mais je ne peux même pas l’imaginer ! » Ses voisins de chantiers partagent unanimement l’avis. L’un d’entre eux raconte qu’un de ses amis s’est tellement « bousillé le dos au boulot qu’il ne peut plus mettre ses chaussures seul avant d’aller au travail, c’est sa femme qui l’aide tous les matins… » Après 50 ans, affirme un autre, « on est tous abîmés ».
La fédération CGT de la Construction, du Bois et de l’Ameublement, rappelle Christian, délégué CGT d’une filiale du groupe Vinci, revendique la reconnaissance de la pénibilité, la retraite à 55 ans pour les travailleurs confrontés aux travaux pénibles et donc pour un 43e régime spécial de retraite pour tous les salariés du bâtiment. Le système par points serait une attaque inacceptable selon lui, d’autant plus qu’après 50 ans dans le bâtiment, il n’y a pas de reconversion professionnelle possible, d’aménagements de fin de carrière. Ça n’existe pas. Alors la suite, pour ces salariés : « Chômage puis RSA », conclut Christian. « Moi, je viens d’une entreprise importante, on a des représentants du personnel, on peut revendiquer sans se faire virer. On a une porte de secours. Dans les TPE, il y a beaucoup de précarité, se mettre en grève c’est mission impossible, tout comme faire reconnaître ses conditions de travail ».
Mission impossible…. Peut-être pas. Fin novembre 2020, les quelque 5 millions de personnes qui travaillent dans les entreprises de moins de 11 salariés pourront élire des représentants. Pour la troisième fois, ces salariés plutôt isolés ou souvent loin d’un représentant qui peut les informer, les aider, les accompagner, auront à se prononcer pour mieux faire avancer leurs droits et leurs conditions de travail.
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